Concertos brandebourgeois n°3, 4 et 5 : une première au Festival de Saintes

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Pour la première fois au festival de Saintes, qui entre dans sa 46ème année, vont être interprétés trois des six concertos Brandebourgeois de Johann Sebastian Bach par l’ensemble « Les Ambassadeurs » créé et dirigé par Alexis Kossenko. Le titre initial de ces Concertos est : Six Concerts à plusieurs instruments. Bach a dédicacé ces œuvres au Prince Christian Ludwig de Brandebourg en 1721.

Séverine Garnier, journaliste habituée du festival, nous donne son avis sur la première de ce soir : « Je pense que c’est la mise en paradoxe d’un festival comme Saintes qui a été à la pointe de la découverte de partitions oubliées, mais au sein duquel on y entend moins qu’ailleurs les chefs-d’œuvre joués fréquemment. C’est pour cela qu’on a rarement entendu les Brandebourgeois à Saintes ».

Selon Hélène Décis-Lartigau, musicologue, « à Saintes on entend surtout des cantates sacrées, des passions, des messes alors que les concertos Brandebourgeois sont associés à une musique instrumentale. C’est insolite et pourtant c’est une musique très appréciée du public, plus facile d’accès. On peut comparer la musique de Bach à de l’architecture assez complexe et les concertos Brandebourgeois sont des monuments plus faciles à saisir dès le départ, quelque chose d’assez saisissant qui parle aussi aux enfants. Cette œuvre constitue un plaisir musical spontané basé sur des masses sonores qui se répondent. Dans les œuvres de Bach, on ne sort jamais comme quand on est entré ».

De plus, ces Concertos Brandebourgeois prennent souvent la forme des concertos grosso. « Le concerto grosso provient de formes italiennes au départ », rappelle la musicologue. Le principe de Concerto grosso est de faire dialoguer un petit groupe d’instruments que l’on appelle le concertino avec le reste de l’orchestre. Bach innove dans certains de ces 6 Concertos Brandebourgeois en faisant ressortir un instrument et le traitant comme le soliste. Par exemple dans le Concerto Brandebourgeois n°5, Bach fait dialoguer deux flûtes et le premier violon avec le reste de l’orchestre. « Bach se saisie de cette forme italienne pour créer cette dynamique, cette énergie, une esthétique sonore fondée sur le mouvement », souligne Hélène Décis-Lartigau.

Bach plonge donc son inspiration dans le style et les formes italiennes : « Le programme de ce soir permet de mettre en perspective le fait que les concertos brandebourgeois de Bach sont nourris par une influence italienne », affirme Alexis Kossenko. Par exemple, le concerto n°3 suit le modèle du concerto du compositeur vénitien Vivaldi à plusieurs chœurs qui dialoguent entre eux.

Finalement, pour le chef et soliste flûtiste, c’est une œuvre unique dans son genre : « On a eu cette perspective de jouer les concertos de Brandebourgeois qui sont sublimes, mais également essentiels de l’histoire de la musique. On a besoin de les jouer et de se laisser impressionner par le génie de cette musique. C’est un privilège de les jouer ici au festival de Saintes, et puis c’était presque une anomalie qu’un festival dédié à la musique baroque et à Bach n’ait jamais eu l’occasion d’interpréter ces concertos ».

Lucas Berard