21 juillet 2018 - écrit par Jean de la Roche

Lucie, festivalière assidue, 87 ans et tous ses crayons

Partager :

Le festival de Saintes accueille des festivaliers assidus de la France entière. Lucie, une angoumoisine (Angoulême) de 87 ans fait l’aller-retour entre Angoulême et Saintes presque tous les jours durant le festival depuis 23 ans. « Quand je viens au festival pour la musique, je profite de tout, car après je rentre. Pour cette édition 2018, je suis arrivée dimanche et je suis repartie lundi soir. Quand j’ai des concerts tard le soir, je dors sur place à l’hôtel. Le reste de la semaine, je pars de bonne heure et je rentre le soir sur Angoulême ».

Lucie n’est pas seulement une habituée du festival de Saintes, mais également de plusieurs festivals dans la région. « Le premier qui est extraordinaire est à Saint-Maixent-l’École, “Bach à pâques”, pendant 4 jours on joue de la musique de Bach. Ça fait un peu plus de 5 ans que je suis toute seule puisque mon mari est décédé, on faisait toujours ça tous les 2 et depuis je continue la tournée des festivals toute seule. Un autre à Celles-sur-Belle (79), “Lumières du baroque”. Tous ces festivals sont enchanteurs ».

Qu’est-ce qui vous plaît au Festival de Saintes ?

Je reviens tous les ans à Saintes à la fois pour la musique, les conférences, les répétitions, les expositions. J’ai d’ailleurs dessiné les costumes de l’exposition, il y a des choses fabuleuses à dessiner. Les expositions de ces dernières sont le summum de la beauté. En plus, il y a de la musique toute la journée de 10h jusqu’au soir. Ce que je ne louperai pour rien au monde c’est l’ensemble Vox Luminis. Je viens tout juste de sortir de leur répétition, j’ai dessiné plusieurs chanteurs, dont Lionel Meunier [ndlr :elle sort son carnet pour me montrer ses dessins].

Comment vous est venu ce goût pour le dessin ?

Sans fierté, pour faire de l’art on est doué ou on ne l’est pas. Cette capacité ne vient jamais de soi-même, mais des parents. Je remercie mes parents de m’avoir rendue douée pour le dessin. J’ai toujours un peu dessiné, j’ai commencé à pratiquer plus sérieusement lorsque mes enfants sont nés. Je suis inscrite dans une école d’art à Angoulême depuis plusieurs années. On dit que pour pratiquer le dessin, il faut au moins en faire avec application en modèle vivant pendant 5 ans. J’ai donc l’habitude de dessiner des gens qui bougent, des musiciens qui se lèvent. Je fais également de l’aquarelle, du collage, des activités artistiques variées.

Dessin ou musique ?

Ah c’est très compliqué ! Quand j’ai eu du temps pour moi, je me suis inscrite dans une école de musique à Angoulême pour pratiquer le chant. J’ai donc fait les deux : chorale et art pictural. J’ai choisi les deux. Un pour la journée, l’autre la nuit.

Est-ce que vous écoutez de la musique en dessinant ?

Bien sûr, c’est très inspirant ! Par exemple au festival, je dessine pendant les répétitions, alors que durant les concerts je me concentre exclusivement sur la musique. La musique c’est une forme d’occupation de l’espace, je m’applique à dessiner quelque chose qui me plait. Ces deux exercices ensembles font du bien à l’âme, l’esprit. Je ne suis pas portraitiste, c’est très compliqué de dessiner un visage en répétition, car il y a beaucoup de mouvements chez les artistes. La difficulté c’est qu’il faut aller vite. J’aime beaucoup le dessin d’architecture, dans les églises. Je dessine en général avec des crayons de couleurs. J’adore aussi dessiner les garages mal rangés, les salles de bain, les choses qui traînent, ce n’est pas le cas chez moi car je suis une rangeuse. Il y a des maisons qui ont un fourbi fabuleux d’objets, c’est ça que j’apprécie le plus. Une année, j’étais très près des musiciens et je voyais particulièrement leurs pieds, alors j’ai décidé de dessiner plein de pieds, les jeunes femmes aux beaux souliers. J’avais titré les dessins : « pieds d’artistes ».

Est-ce que vous aimeriez que vos dessins soient publiés ?

Je vais peut-être faire une exposition l’année prochaine, mais ça demande beaucoup de travail. Je préfère dessiner qu’organiser une exposition, même si j’en ai déjà organisé auparavant. Chaque année, je donne mes dessins à Léa [graphiste à l’Abbaye aux Dames], elle les scanne, et puis certains sont diffusés sur le site ou le blog. Ca me suffit largement.

Avez-vous suivi la victoire de l’équipe de France de football ?

Je suis venue sous la voile pour voir la finale, mais je me suis un peu écartée à cause du bruit. Quand j’ai entendu des hurlements, j’ai été inondée de joie alors que je ne comprends rien au foot. Je ne comprend pas pourquoi ils ne donnent pas un ballon à tout le monde, pourquoi il n’y en a qu’un et tout le monde veut l’avoir. Je l’ai souhaité de tout mon cœur cette victoire. Je voulais faire des dessins durant le match, mais il y avait trop de monde. J’aurai pu en effet dessiner la foule qui lève les bras en l’air. Ce que je souhaite a tout pris, c’est de revenir l’année prochaine.

A la fin de l’interview, elle interpelle Lionel Meunier pour lui montrer les dessins qu’elle a réalisé durant la répétition de Vox Luminis. D’ailleurs, Lionel Meunier à l’air de la connaître…

Lucas Berard