15 juillet 2019 - écrit par Jean de la Roche

Ouvrez, ouvrez la porte aux nouveaux !

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A l’heure où les représentations classiques débutent dans les festivals, l’observateur que je suis, c’est-à-dire à peine majeur, observe un étrange balai de cheveux blancs, chemises et robes plus chics les unes que les autres.

Il existe des rituels invariables, l’univers du classique a son lot. Les artistes rentrent, le public applaudit, les artistes jouent, le public ne fait aucun bruit. « Je trouve bien que cela existe dans le concert, ça donne une tenue » pense Charlotte, festivalière de 70 ans. Ce déroulement, presque cérémonial, est un des marqueurs, un code dans la manière d’être spectateur. L’ignorer ou refuser de s’y soumettre revient à s’exposer aux interpellations et autres interjections. L’enfant en bas âge, la quinte de toux, l’allergie aux pollens sont étrangement devenus incompatibles avec tous les compositeurs de musique classique, à partir du moment où le concert est public.

Les festivaliers interrogés sur l’homogénéité de ce qui pourrait s’apparenter à un « club », émettent chacun leurs hypothèses pour le décrire et le comprendre. Certains avancent qu’une culture poussée de la musique est nécessaire afin de profiter pleinement des concerts. Anne, festivalière de 62 et ancienne journaliste, va un peu plus loin. « C’est une classe sociale cultivée, dit-elle, puisque c’est une musique exigeante ». Charlotte, mécène qui assiste aux répétitions et aux concerts, soutient ce dernier point mais elle ne rejoint pas Anne sur la nécessité d’un bagage culturel conséquent. « J’en suis la preuve vivante. J’aime la musique pour le son, l’harmonie mais je ne connais pas le solfège et je ne joue pas d’un instrument ».

Que la classe sociale représentée soit homogène et que le grand public, malgré qu’il soit bienvenu, semble absent de ces rendez-vous est « une question de budget » selon elle. Sur ce point les festivaliers sont unanimes, le fait de venir à un festival de musique classique représente une somme que tout le monde ne peut se permettre de dépenser dans le but de passer un moment d’enrichissement culturel. « Ce sont des personnes qui financièrement peuvent s’offrir une semaine de musique à 300 ou 400 euros » ajoute Anne.

Le public étant au rendez-vous chaque année sur ces rendez-vous classiques, il semble évident que les festivals ne peuvent changer radicalement leur programmation, au risque de perdre les habitués qui représentent la majorité des festivaliers. « Ce n’est pas une volonté d’écarter les autres publics mais peut être plus une volonté de conserver leur public » selon Anne.

Une des solutions pour faire découvrir et démocratiser ce genre musical est l’ouverture des répétitions à tous, gratuitement, ce qui se produit à Saintes mais reste rare dans le milieu encore. Tout le monde y trouve son compte, les habitués parce qu’ils découvrent une facette qu’ils ont rarement l’occasion de voir, un moment où les codes sont mis de côté. « On voit les musiciens sous un autre jour, il y a ce côté sympathique et bon enfant » explique Charlotte. Quant au nouveau public, laisser les portes ouvertes lors de ces moments privilégiés avec les musiciens, permet de profiter, de découvrir, partir sans attendre les applaudissements… en short et tee-shirt, avec un enfant en bas-âge ou une quinte de toux.

Thomas